LE BOUQUINOROUM

| UNE LABORANTINE - 02

II

Au lendemain de cette conversation angoissante, Marcel Breschet, sur les huit heures du matin, descendait à Paris du train de Nevers, fidèle à la promesse faite à son père. Il avait voulu prendre le rapide de nuit, par un scrupule, où ce père aurait retrouvé ce sens du métier qu’il aimait à transmettre à son fils. Le professeur avait un reliquat de copies à corriger. Il avait tenu à les finir, pour les laisser annotées au maître d’études qui devait le remplacer. Cette besogne achevée, parmi les préparatifs de son départ, avait un peu trompé son anxiété qui le reprit plus forte dans le train. Quel homme allait-il trouver dans ce grand-père, demeuré pour lui une énigme ? Il comptait à peine douze ans lors de la rupture entre Antoine et Marcelin Breschet, dont le nom n’avait plus jamais été prononcé dans la maison. Les tragédies de famille silencieuses sont les plus torturantes pour les jeunes sensibilités, chez lesquelles les faits, qu’elles ignorent et dont elles subissent le poids, servent de prétexte à des imaginations invérifiables et d’autant plus vives. Quoique les fonctions exercées par son père en province, d’abord de receveur, puis de trésorier-payeur général n’eussent jamais permis un contact direct avec l’industriel toujours occupé à Paris, celui-ci restait dans le souvenir de son petit-fils comme un homme très affectueux, d’une conversation fascinante, et qui, dans ses trop rares passages, le gâtait beaucoup. Il savait également, par ses visites à Vertaizon, – il le rappelait à son père dans leur entretien, – quelle saute de milieu avait assuré aux siens l’énergie et l’esprit d’entreprise de l’homme d’affaires. Sans lui et ses audaces, les Breschet restaient de gros paysans. Ils ne devenaient pas les bourgeois cultivés qu’ils étaient devenus. Marcel comprenait maintenant que les quémandages d’argent dont se plaignait son père n’étaient pas l’unique cause d’une brouille qui touchait à l’ingratitude. Il se rendait bien compte que l’influence de sa mère, dont il pressentait maintenant les raisons, avait aggravé les sévérités du fils contre son père, dépensier et peu délicat. Quel incident nouveau allait lui révéler dans cet ordre l’enquête qu’il avait accepté d’entreprendre et dont les difficultés lui apparaissaient, au terme de ce voyage insomniaque, comme insolubles ? En touchant du pied le seuil du quai de la gare de Lyon, il fut tenté de reprendre aussitôt le train de retour. Et puis l’implorante phrase de son père, ce « tu m’es bien secourable » lui revenant :

 

« Ce serait une lâcheté, » se dit-il et il héla un taxi pour lui donner l’adresse du paisible hôtel de la rue des Écoles où il avait retenu son logement par dépêche et qui, tout voisin de la vieille Sorbonne, portait le nom du collège fondé par Mazarin : « Les Quatre-Nations. »

 

« L’Université me poursuit, » se disait-il encore quand la voiture s’arrêta devant la porte de la modeste maison où il avait séjourné lors de ses examens d’agrégation.

 

« J’avais tant d’espérance alors, » songeait-il et le souvenir de l’attrait intellectuel que lui avait représenté son métier de professeur s’accompagnait d’un renouveau de la répulsion commune à Chardon et à lui, contre la monotonie de cette carrière, et contre la sécheresse forcée de ses études actuelles. Cependant il ouvrait sa valise. Il rangeait ses petits bibelots et les papiers relatifs à son Janus, dans cette chambre située, par hasard, porte à porte, à côté de la pièce où il préparait autrefois son agrégation. Le sentiment de sa détresse actuelle fut si fort qu’il demanda aussitôt l’annuaire du téléphone, pour y chercher le numéro de l’appartement où logeait son grand-père au boulevard Suchet. Puis quand descendu au bureau de l’hôtel il eut disposé les lettres sur l’automatique, il raccrocha soudain le récepteur :

 

« Je ne suis pas assez maître de moi », se dit-il. « J’irai cet après-midi. Le plus sage est de commencer mes recherches sur cette laborantine. Si Cortet se trouve à Paris, c’est lui qui pourra le mieux me renseigner. Mais travaille-t-il toujours à Laënnec ? »

 

C’était le nom d’un de ses camarades d’enfance, interne dans un des hôpitaux de Paris. Les deux jeunes gens s’étaient toujours montré une chaude affection et restaient en correspondance l’un avec l’autre, assez irrégulièrement mais très amicalement. L’annuaire permit à Marcel d’entrer aussitôt en communication avec l’hôpital. Cinq minutes plus tard il entendait la voix de son camarade d’Auxerre lui répondre avec le plus joyeux accent :

 

– Toi, à Paris ! Nous déjeunons ensemble. Viens à Laënnec à midi. Vite je te quitte, car je cours aider mon patron qui va faire une opération passionnante.

 

« Passionnante ! Une opération ! » se répétait le pauvre professeur en s’acheminant à l’heure dite vers l’hôpital de la rue de Sèvres. « Faut-il qu’il l’aime, lui, son métier ! »

 

– Cette opération passionnante, quelle était-elle ? demanda-t-il d’abord à Cortet qui l’attendait à la salle de garde, encore vêtu de sa blouse d’interne.

 

– Une craniectomie pour tumeur du cervelet, répondit Cortet. Je voudrais que tu voies ce trépan, c’est un prodige d’intelligence actionné par une machine électrique. Il est bloqué dès qu’il ne rencontre plus de résistance. Il s’arrêtera juste à la dure-mère, sans l’entamer. Quelle merveille !

 

Marcel Breschet, malgré la fatigue du voyage et l’énervement de l’insomnie, retrouvait, à constater l’enthousiasme de Cortet ce vif intérêt que lui donnaient toujours les choses intellectuelles.

 

– Comme je t’envie ! dit-il à Cortet. Moi qui suis à Paris pour m’occuper de ma thèse sur le culte de Janus dans le monde romain !

 

– Et moi, répondit Cortet en riant, je bénis Janus qui me fait retrouver mon vieux copain. Tu es libre pour déjeuner ? – Et sur un signe de son ami : – Attends quelques instants, le temps d’enlever ma blouse et de me faire remplacer pour deux heures à la salle de garde.

 

Vingt minutes plus tard, ils s’asseyaient l’un à côté de l’autre, à la terrasse d’un restaurant du boulevard Montparnasse dont l’enseigne annonçait qu’il pratiquait la spécialité des mets régionaux.

 

– Nous sommes jeudi, fit l’interne en consultant la carte, justement le jour de notre pays. Nous allons voir si les plats morvandiaux d’aujourd’hui valent ceux de notre jeunesse. Tu te rappelles, ce jambon à la crème qui faisait nos délices à Auxerre ? Il faut que je t’organise un peu de plaisir à Paris pour te reposer le soir de ton Olympien. Malheureusement mon service d’hôpital ne me laisse pas beaucoup de temps.

 

– Mais celui qu’il te prend est si bien employé, à en juger par la séance de ce matin, répondit Marcel.

 

Le visage du carabin, bien régional lui-même, avec ses cheveux noirs plantés bas, ses yeux marrons et ses joues colorées, s’amertuma d’un mauvais sourire :

 

– Toutes les opérations ne se ressemblent pas, dit-il, et puis, ce n’est pas ça, la carrière. La carrière, c’est les concours à passer, d’abord l’adjuvat, le professorat, le bureau central, huit à dix ans de travail forcené. Et puis les camarades. Des concurrents souvent envieux – tu connais le proverbe : Indivia medicorum, – mauvais coucheurs, rosses ! Plus tard, il y a les clients et la bataille des honoraires, et, quand il s’agit des hauts postes, la tyrannie des facultaires officiels qui n’admettent pas le talent libre. Jusqu’ici, je n’ai pas eu à me plaindre. Le petit Morvandiau fait son petit bonhomme de chemin sans trop d’à-coups. Mais quand je songe aux angoisses qui me sont réservées !

 

– Où n’y en a-t-il pas ? dit Marcel.

 

– Mais dans ta profession à toi, répondit Cortet. Tu as passé ton agrégation. Tu passeras ta thèse. Tu ne dépends pas de l’aléa des concours et de l’humeur des malades. Tu dépends de tes idées.

 

– Si les choses sont comme tu le dis, objecta Marcel, qui apercevait le moyen d’amorcer l’enquête désirée par son père : comment se fait-il que nous voyions tant de femmes entrer aujourd’hui dans les carrières médicales ou paramédicales ? Précisément, continua-t-il, je suis chargé, durant ces quelques jours que je vais passer à Paris, d’une enquête sur une jeune fille, employée à l’Assistance publique et qui travaille dans un hôpital à titre de laborantine.

 

– Un métier nouveau, fit Cortet, toujours avec son mauvais sourire : une carrière féminine de plus, la manie de notre temps, le progrès ! Comme si une femme avait d’autre carrière raisonnable que de tenir son ménage et de faire des enfants. Si ta laborantine est dans un hôpital, elle est chimiste ou bactériologiste, c’est-à-dire spécialisée dans les microbes et les examens des inoculations au microscope. Ces filles gagnent de sept cents à mille francs par mois, pour vivre parmi les bacilles et ensemencer des milieux de culture. Il leur faut avoir passé leur bachot et fait trois ans d’études. Le progrès ! le progrès !… répéta-t-il. Mais d’abord, comment s’appelle ta laborantine ?

 

– Paule Gauthier, répondit Marcel.

 

– Et que veux-tu savoir d’elle ?

 

– Comment elle vit, et si elle est sérieuse. Il s’agit d’un projet de mariage à Nevers, un peu pressé.

 

Il avait rougi de son mensonge, et Cortet interprétant ce passage d’embarras, lui demanda :

 

– Ce mariage, c’est le tien ?

 

– Pas le moins du monde, répliqua l’autre vivement.

 

– Tant mieux ! fit son ami. Je vais me renseigner dès cet après-midi. Je saurai quel poste elle occupe. Gauthier, tu dis Paule Gauthier ? Jolie ou laide ? Tu l’as rencontrée à Nevers ?

 

– Jamais, et j’ignore tout d’elle.

 

– Si elle est jolie, il y a bien des chances pour qu’elle ne soit pas sage. Mais ça, c’est une opinion d’interne. Il y en a aussi de jolies qui sont sérieuses, comme tu dis. Celles-là visent le bon mariage. Là il faut y regarder de près et ce n’est pas commode. Tu y tiens beaucoup, à ce renseignement ?

 

– Beaucoup.

 

– Paule Gauthier ? Je saurai ce soir à quel hôpital elle est attachée, et je te le téléphonerai. À quelle heure seras-tu à ton hôtel ?

 

– Vers sept heures. Et si je n’étais pas là…

 

Cette hésitation dans sa réponse indiquait déjà son incertitude sur cette visite à son grand-père qui faisait pourtant le principal objet de sa présence à Paris.

 

– Eh bien ! si tu n’es pas là, je prierai le portier de ton hôtel de te transmettre simplement le nom de l’hôpital. Je suis de garde et, si tu as quelque autre détail à me demander, téléphone à Laënnec.

 

C’était rendre à Marcel sa pleine liberté pour sa visite. Aussitôt seul, celui-ci s’achemina en effet vers le lointain boulevard Suchet où habitait le vieil industriel. Comment celui-ci allait-il le recevoir ?… Affectueusement ?… Alors il le retiendrait sans doute à dîner, et, dans ce cas, il faudrait attendre pour savoir le nom de cet hôpital où travaillait Mlle Gauthier… Cérémonieusement ?… Rendrait-il son petit-fils solidaire de la querelle familiale qui durait depuis des années ?… Aborderait-il tout de suite cette question du prêt d’argent, avec l’idée que le jeune homme arrivait comme messager de son père ?… Le malheureux garçon agitait lui-même ces pensées, tandis qu’il suivait à pied le boulevard des Invalides, les quais, l’avenue du Trocadéro. Ses yeux de provincial s’étonnaient de la manie constructive qu’il constatait en rencontrant à chaque détour de rue des débris de vieilles bâtisses en voie d’être jetées à terre, ou des façades de maisons neuves à huit étages. Que ce mouvement général eût entraîné Marcelin Breschet dans une nouvelle série d’entreprises, c’était trop naturel, étant donnée toute sa vie, et trop naturel aussi que ses affaires de construction comportassent des risques considérables. Le quémandage de la lettre s’expliquait ainsi. Nul besoin d’imaginer une influence féminine ou un coup de Bourse imprudent. L’aspect de ce long boulevard Suchet s’accordait trop avec l’hypothèse de quelque grosse erreur spéculatrice. Les mots d’« appartement à louer avec confort moderne », se lisaient sur trop d’écriteaux aux portes et aux fenêtres de ces maisons neuves. Les sociétés qui les construisaient, et, par conséquent, leurs chefs devaient subir des menaces de faillite. Marcelin Breschet n’était-il pas un de ces chefs ? Il habitait un des étages d’un de ces édifices somptueux. C’était bien le logis des spéculateurs comme lui, sans mesure dans leurs jours d’optimisme et d’espérance, quitte à engager leur honneur. Marcel vit distinctement ces syllabes, écrites d’une plume nerveuse, dans la lettre de son grand-père. Il s’arrêta devant la ferronnerie de la porte et voici qu’il se retira sans sonner. Son énergie défaillait devant la perspective de cette première entrevue avec ce vieillard qu’il venait espionner. Il lui fallait bien se prononcer ce mot, toujours vil et qui devient sacrilège, lorsqu’il s’agit d’un aïeul.

 

« Je reviendrai quand je serai mieux renseigné. »

 

Il hélait, en se prononçant cette phrase dilatoire, une automobile à laquelle il donna l’adresse de la Bibliothèque Nationale. Il allait se réfugier dans son métier d’universitaire, dont la veille encore il se lamentait auprès de son collègue Chardon. En cours de route, signe nouveau de son intime agitation, il changea encore d’idée et demanda au chauffeur de l’arrêter sur la route mais à une rue et à un numéro qui n’étaient pas l’adresse de la Bibliothèque. Un agent de change demeurait là, du nom d’Ennebault, que son père lui mentionnait autrefois comme s’étant à une époque, chargé heureusement des intérêts de son grand-père. À l’heure de la Bourse, il y avait bien des chances pour que l’agent de change ne fût pas là. Il y était cependant et il accueillit le jeune homme sur la présentation de sa carte avec une cordialité qui fit du bien à Marcel. De ce côté-là, il n’y avait donc pas lieu de s’inquiéter.

 

– Vous êtes le petit-fils de mon client et ami, M. Marcelin Breschet ? Vous ne venez pas m’annoncer de mauvaises nouvelles de votre grand-père ? Je ne l’ai pas vu depuis si longtemps.

 

C’était répondre d’avance aux questions que le jeune homme se préparait à poser avec un peu de honte. Il se contenta de dire qu’il venait saluer M. Ennebault de la part de son père, lequel avait eu, pour un important placement, plusieurs années auparavant, beaucoup à se louer de l’agent de change. Celui-ci demeurait évidemment un peu étonné par ce prétexte d’une visite que Marcel, une fois rassuré sur cette partie financière de son enquête, ne prolongea point, et, négligeant sa première idée d’une séance à la Bibliothèque Nationale, il rentra à l’hôtel des Quatre Nations, pour écrire à son père une lettre officielle et qui disait son heureuse arrivée à Paris. Il griffonna ensuite une note confidentielle qu’il rapporterait à Nevers, comme le compte rendu de cette première journée. Il attendait, non sans une impatience grandissante, le téléphonage de Cortet qui pourtant arriva plutôt en avance et qui lui apprit que Mlle Paule Gauthier était laborantine à l’hôpital des Enfants-Malades, rue de Sèvres.

 

« Il est près de six heures », se dit-il en regardant sa montre. « C’est le moment où le travail des infirmières doit s’arrêter… Si j’allais à cet hôpital ! Quoi faire, puisque je ne connais pas celle-là, même de vue ? Tentons quand même la chance. Cette première journée donne déjà quelques résultats inespérés : la rencontre de Cortet, la visite chez Ennebault, ce renseignement sur l’hôpital de Paule Gauthier. Essayons toujours d’avoir quelque nouveau renseignement. »

 

Il allait en effet, contre toute vraisemblance, en obtenir un et de premier ordre, qu’il ne pouvait pas prévoir. Les anxiétés comme la sienne ont leurs divinations qui ne sont un hasard qu’en apparence. Creusant avec une logique minutieuse toutes les hypothèses, elles rencontrent sans cesse quelque élément de vérité. Après avoir étudié sur un plan de Paris, affiché dans le bureau de l’hôtel, le plus court chemin pour arriver aux Enfants-Malades, il s’engagea par la rue des Écoles et gagna la rue de Sèvres. En vingt minutes, il avait dépassé l’angle de cette rue et du boulevard Montparnasse, et il se trouvait à la porte de l’hôpital. Plusieurs femmes se pressaient d’en sortir, évidemment des infirmières qui se retiraient, comme il l’avait prévu, leur journée faite. Elles allaient, d’un pas hâtif, habillées, les unes élégamment, celles-là simplement correctes. Un autre jeune homme se trouvait là, immobile et qui attendait, comme Marcel. À un moment, cet inconnu s’avança vers une des jeunes filles, jolie, avec de grands yeux noirs dans un teint pâle, qui s’animèrent d’un regard plus vif à l’approche du jeune homme.

 

– On est en retard, disait celui-ci.

 

– J’ai eu une analyse un peu délicate à terminer, et je n’ai pas voulu quitter le Labo sans que la question fût au point.

 

– Il y a des jours où je crois que tu me le préfères, ce maudit Labo.

 

– Je l’aime et je t’aime, répondit-elle en appuyant sons bras sur celui de son amoureux.

 

« Toutes ces petites sont-elles des laborantines ? » se demandait Marcel en regardant s’en aller ce couple parmi les groupes qui se dispersaient en tous sens. » Le Labo, semble-t-il, est propice aux idylles. Si c’était sur celle-là que tique mon grand-père, il n’aurait pas mauvais goût, mais les cent mille francs pourraient bien passer dans la poche de ce joli garçon. »

 

III

Marcel ne se serait pas tenu un autre discours, s’il eût pu deviner que son attente, à la porte de l’hôpital l’avait mis, à son insu, en présence même de cette mystérieuse Paule Gauthier soupçonnée d’exploiter le vieillard, isolé de sa famille, qu’était Marcelin Breschet. Mais le petit-fils gardait, à travers une séparation de tant d’années, trop de respect à l’égard de son grand-père pour ne pas reculer devant l’idée d’une duperie aussi déshonorante que dangereuse. Il fallait, à tout prix, tirer au clair les rapports de la laborantine inconnue et de l’homme d’affaires. Cette fois l’enquêteur n’hésitait plus. La visite au boulevard Suchet ne devait pas être différée ; et dès le lendemain, il sonnait de grand matin à la grille de la somptueuse bâtisse devant laquelle il hésitait la veille.

 

« Comment va-t-il me recevoir, et même me recevra-t-il ? Certainement il croira que j’apporte la réponse à sa lettre : et que lui dirai-je ? » se demandait-il après avoir remis sa carte à un personnage, mi-domestique, mi-secrétaire, qui attendait dans l’antichambre, presque dénuée de meubles. De grandes glaces et des panneaux de bois moiré dénonçaient des projets de luxe interrompus et voici qu’un vieillard entrait, tenant la carte à la main. C’était le grand-père et il prenait dans ses bras son petit-fils, avec une émotion expansive, qui devait étonner le témoin de cette scène, habitué chez son patron à d’autres attitudes :

 

– Pourquoi ne pas m’avoir prévenu, mon petit Marcel ? disait l’aïeul bouleversé en entraînant le jeune homme dans son bureau. Tu aurais logé ici. Que je te regarde ! Ah ! tu es bien un vrai Breschet. Tu en as les yeux, les cheveux et la belle carrure auvergnate. Donne-moi des nouvelles des tiens. Ton père n’est pas malade, qu’il ne t’a pas accompagné ?

 

Un regard inquisiteur luisait dans ses prunelles. Évidemment, il pensait à sa lettre dont il ne voulait pas parler le premier. Mais le fond affectueux de sa nature l’emportait sur toute autre préoccupation, et il continuait, multipliant ses questions sur la vie de son fils à Montigny, sur celle de son petit-fils à Nevers. À peine nomma-t-il sa bru dans une phrase incidente, témoignant ainsi d’une persistante rancune. Il voyait en elle une des causes de son isolement et il lui en voulait. Était-il possible que cet homme âgé, dont les sentiments familiaux restaient si vifs, fût le héros d’un drame de luxure abject et qu’il méditât de dépouiller son fils, par suite son petit-fils, d’une somme considérable, au profit d’une honteuse liaison ?

 

– Je suis venu à Paris, répondit Marcel à des demandes hâtives et multipliées auquel un regard fixe donnait un sens inquisiteur, pour quelques recherches à la Bibliothèque Nationale sur la thèse que je prépare.

 

Il en dit le titre qui provoqua cette exclamation du grand-père, évidemment résolu à ne faire la moindre allusion à sa propre lettre :

 

– Décidément, les Romains ont conquis la Gaule, puisque les descendants de ceux qui se battaient contre eux à Gergovie ou à Merdogne, – tu as lu la controverse sur ce point de notre histoire ? – s’occupent du dieu Janus, et du culte qu’on lui rendait.

 

Comme il énonçait cette phrase qui prouvait combien l’Auvergnat, chez lui, s’intéressait encore aux problèmes de l’histoire locale, le domestique-secrétaire vint lui passer une autre carte de visiteur :

 

– Je vais le recevoir tout de suite, dit-il, – et à son petit-fils. – C’est un des gros actionnaires de notre Société et qui doit nous verser aujourd’hui même une forte somme.

 

Deficiente pecu… deficit omne,… nia.

 

Ce vers latin parodique c’est pour M. le professeur. Il s’était levé et, forçant Marcel à se rasseoir lui-même :

 

– Tu vas peut-être m’attendre un peu de temps. Janus ne t’en voudra pas, et tu auras les journaux à lire… Il lui en tendait plusieurs qui s’entassaient sur la table. Et puis, c’est entendu, je t’emmène déjeuner.

 

« Quel homme actif », se disait Marcel, en regardant, non pas les journaux, mais les papiers accumulés dans une magnifique bibliothèque, « et que de dossiers ! Que d’affaires ! Il y a vraiment deux choses inexplicables : l’une qu’il ait besoin de nous emprunter cent mille francs, vivant dans ce luxe… » Il s’étonnait de plus en plus du décor du salon. L’autre, qu’il se laisse exploiter par une infirmière, du type de celles que je voyais hier sortir de l’hôpital. Il est certainement sur le bord de la fortune, encore une fois. Mon père me l’a si souvent décrit dans ses avatars différents. Ou bien serait-il de nouveau à la veille de sombrer dans son affaire de bâtiments, mal gérée ? Mais non, ce gros actionnaire apportant la forte somme, a donc confiance, et grand-père aussi a confiance. À coup sûr il n’a pas l’air inquiet. Quel contraste entre cette riche habitation et ce milieu d’hôpital dont je garde l’impression dans les yeux ! Si cette fille le trompe en l’exploitant, et qu’il l’aime, comment ne l’en a-t-il pas tirée ? Oui, je comprends que mon père, si régulier, si strict, si conformiste, comme dirait ce bolcheviste de Chardon, le parfait fonctionnaire, n’ait pu s’entendre avec lui. Tous deux cependant sont bien des Auvergnats, de cette race du Plateau central, qui se resserrent sur eux-mêmes, se terrent dans leurs habitudes, ou bien se déchaînent dans l’espérance, et alors, ils hasardent tout. Ils ressemblent à leur pays avec ses grandes coulées de lave immobile, et, à l’horizon, une chaîne tumultueuse de cratères, les Vésuves d’hier et de demain sans doute. Et moi, je tiens de ces deux caractères, et par ma mère à cette Bourgogne où tour à tour ont habité les Éduens, ces alliés de Rome, puis les colonies Germaines et Sarmates, puis les Burgondes, puis les Sarrasins. Que de troubles dans le passé de cette province, qui fut pourtant le premier duché-pairie de France. Auvergnat et Burgonde, quelles hérédités ! D’où mon incertitude intérieure. Rattachons-nous à l’humble devoir : découvrir la vérité sur la crise que traverse mon grand-père. Et avec cela, me voici bien loin de ma thèse.

 

Il faudra pourtant y penser aussi et aller à la Bibliothèque Nationale cet après-midi. »

 

L’incohérence de ces réflexions avait pourtant son unité. Elles attestaient ce mélange si particulier de réminiscences historiques et de scrupules personnels qui se rencontre chez tant de jeunes professeurs. Marcelin Breschet cependant rentrait de son entretien avec le gros actionnaire. Il parlait aussitôt de cette thèse qui venait de hanter de nouveau son petit-fils :

 

– Quelle raison t’a donc poussé à t’occuper de Janus ? lui demanda-t-il.

 

Marcel, ému de cette identité de préoccupations, se laissa aller, en répondant, à parler de lui-même avec une vérité qu’il n’avait pas avec son père :

 

– Tout enfant, vous rappelez-vous, grand-père, que vous me reprochiez d’être curieux ?

 

– Oui. Tu remarquais tout. Je me souviens : au baptême de ton cousin Monestier, à Chauriat, tu me demandais : Grand-père, cet enfant de chœur que voulait-il qu’on apportât, en disant toujours : Amen, amen ?

 

– Cette curiosité de petit garçon, répliqua Marcel attendri encore par cette évocation des temps d’union familiale, c’était le goût de savoir, qui n’a fait que grandir avec l’âge. Ce goût m’a décidé à cette carrière d’universitaire qui suppose des études poussées assez loin. Elle comporte aussi, dans les postes de début, des obligations assez décevantes. Pour m’en débarrasser, il faut que je sorte des classes de lycée et que je passe à une chaire de faculté. Ce passage exige le doctorat. L’histoire des idées religieuses m’a intéressé. J’ai été naturellement conduit à m’occuper de leur origine. Aux environs de l’église de Vézelay, il y avait les ruines d’un temple, que je visitais tout enfant, et dont mon père me dit qu’il avait été celui d’un dieu à deux visages, appelé Janus. Ces deux visages m’intriguèrent et voilà comment je fus conduit à étudier le culte de Janus en Gaule.

 

– Ah ! s’écria le grand-père. Que tu es bien de mon sang, de celui du vieux Breschet qui n’a pas pu se contenter de l’échoppe de tailleur de son père ! Il a sauté à l’Hôtel-Dieu de Clermont, puis de Clermont à Paris, où il finit par remplacer le grand Dupuytren dans son service, pour lui succéder à l’Institut. Quelle étape ! Je te vois, également, de ton lycée de province, montant à la faculté dont tu rêves, et pourquoi pas, toi aussi, à l’Institut ? Tu as raison, vois-tu. Oser, entreprendre, c’est ça vivre ; ne jamais se contenter de son sort. On ne réussit pas ? On recommence. Je n’ai jamais compris ton père de s’être complu à la monotonie de son existence de fonctionnaire. Quand nous en parlions, il disait : sécurité ; moi, je répondais : risque. J’ai, dans mes entreprises, traversé quelquefois de mauvaises périodes et toujours j’ai recommencé. Encore aujourd’hui, dans cette société de constructions que j’ai fondée, il y a des heures difficiles. J’en triompherai et mon petit-fils sera ce personnage peu commun : le Sorbonnard millionnaire.

 

Marcel, en écoutant ces propos, songeait : « Mais le motif de sa demande du prêt de cent mille francs, le voilà : une de ces difficultés. Peut-être la venue du gros actionnaire l’en tire-t-elle déjà, qu’il n’en parle plus. Où avais-je la tête d’imaginer une basse aventure sentimentale, à son âge et avec cette fièvre d’activité ? »

 

Et il écoutait son grand-père continuer :

 

– Mais pensons à toi. Une thèse, ça s’imprime, ça se publie chez un éditeur.

 

– Oh ! la mienne, fit Marcel, n’est encore qu’en projet, à peine commencée.

 

– N’importe, répondit le vieil optimiste, il faut dès maintenant préparer les voies. Je connais justement une maison d’édition où je vais te mener, pour que tu causes avec le secrétaire, un jeune homme que j’ai pu placer là. Il s’appelle Gauthier. Son père était un de mes garagistes, quand je m’occupais d’automobiles. Cet homme est mort à mon service dans un accident et j’ai considéré comme mon devoir de m’occuper de ses enfants. Il y en avait deux, une fille et ce garçon, qui réussit très bien chez son patron, auquel il voudrait succéder quelque jour. On l’y aidera. C’est encore un des bénéfices de la vie d’affaires : on peut appuyer autour de soi des gens qui le méritent, et ce Gauthier est vraiment digne d’appui. Il connaît des écrivains, des savants, et, si je ne me trompe, des archéologues. Auquel cas, ses conseils pourraient t’être précieux.

 

« Gauthier ! » se répétait Marcel. « Mais la voilà, l’explication de l’intérêt qu’il porte à la laborantine, si elle est la sœur de ce garçon et la fille de l’accidenté. Il est vrai que cette sorte d’intérêt, quand il s’agit d’une jeune fille jolie et galante, ça tourne mal quelquefois… »

 

Il se rappelait cette troupe d’infirmières qu’il avait vues sortant la veille de l’hôpital, et l’attitude de celle qu’il avait remarquée, s’en allant tendrement et familièrement au bras de l’amoureux qui l’attendait. Qu’il se fût ainsi rencontré dès le premier soir de son arrivée à Paris, avec cette Paule Gauthier qu’il cherchait, comment se le fût-il même imaginé ? Mais cette similitude de noms, entre le secrétaire de librairie protégé par son grand-père et l’intrigante dénoncée à son père, le frappait tellement qu’il ne put penser à autre chose pendant le déjeuner passé tout entier à écouter ce grand-père qui racontait le travail de sa société, fondée pour exploiter une bande du terrain des anciennes fortifications, et tandis que vers deux heures, les deux convives se dirigeaient vers la rue Saint-Guillaume où se trouvait la boutique de l’éditeur chez lequel Gauthier était employé, il ne s agissait plus pour le futur docteur de la visite à la Bibliothèque Nationale et des savantes recherches projetées sur Janus :

 

« Qui est cette sœur et quel métier exerce-t-elle ? »

 

Cette question occupait tout son esprit, et il s’en taisait, comme l’homme d’affaires continuait à se taire sur sa demande des cent mille francs faite à son fils. Quel rapport pouvait-il y avoir avec l’existence, soudain révélée, de cette sœur du secrétaire placé par le patron de l’automobiliste mort au service de la maison Breschet ?

 

– C’est pourtant à mon usine de papier de Saint-Amand-Tallende, disait celui-ci à l’entrée de la rue Saint-Guillaume, en montrant sur une façade l’étiquette « Librairie Gillequint », que je dois d’être en si bons termes avec M. Gillequint. Nous nous sommes connus, lui presque enfant à cette époque. Voilà encore un des avantages du métier d’homme d’affaires. Que d’amis il se fait le long de sa vie, pourvu qu’il soit toujours correct ! C’est une vieille maison, ajouta-t-il pour justifier l’aspect désuet de l’immeuble, par trop contraire à ses théories d’audacieuse modernité. Gillequint est tout nouveau, lui, dans l’édition. Raymond Gauthier a bien l’intention de transformer la boutique, si jamais il en devient le chef. Il y a déjà introduit quelques nouveautés, dont ces vitrines où l’on voit exposés les derniers volumes parus, avec la photographie des auteurs. Mais allons à son bureau. C’est lui qui surveille la vente pendant que Gillequint dirige les comptes et signe les traités.

 

La pièce attenante à la boutique, où se tenait le protégé de l’industriel, était étroite et sombre, mais rangée avec un soin qui prouvait l’esprit d’ordre de l’employé. Il se leva pour saluer l’ancien patron de son père, et Marcel crut remarquer sur son visage une certaine expression de gêne qui contrastait avec la cordialité du vieillard. Toujours préoccupé des relations de celui-ci avec la laborantine et par la possibilité d’une étroite parenté de cette inconnue avec ce jeune homme du même nom, il pensa du coup que ce dernier éprouvait une secrète défiance vis-à-vis du bienfaiteur qui l’avait pourtant placé là, et d’où pouvait provenir cette défiance, sinon d’un soupçon ? Marcel allait, dès les premiers mots, apprendre que l’employé de librairie était en effet le frère de cette Paule Gauthier dont la recherche était l’un des motifs de son voyage à Paris et qui devait intéresser bien vivement son grand-père, d’après sa première question :

 

– Comment va Paule ? demanda-t-il. Tu l’as vue ce matin ?

 

– Elle est partie trop tôt, répondit Raymond Gauthier, mais maman l’a vue. Elle était un peu agitée d’une de ses petites malades qui a deux ans et un mois, et qui souffre d’un Dolichocôlon pelvien. Vous savez comme elle prend son métier à cœur. Son Labo, c’est toute sa vie.

 

– Et je te présente quelqu’un d’aussi laborieux qu’elle, mon petit-fils, Marcel Breschet. Je l’ai amené ce matin pour que tu l’aides. Professeur à Nevers, il est venu à Paris pour étudier la préparation de sa thèse de docteur. Il la fera imprimer chez vous, cette thèse. Ça, c’est pour plus tard. Dès aujourd’hui, tu peux lui rendre service. Cette thèse porte sur un dieu Romain : vous avez bien, parmi vos auteurs, quelqu’un qui s’occupe de mythologie païenne ?

 

– En effet, répondit Gauthier, et le plus compétent qui soit dans la matière. Monsieur connaît certainement son nom : le Père Desmargerets.

 

– L’auteur du Symbolisme dans la sculpture antique, cet ouvrage capital ? fit Marcel.

 

– Et qu’il réimprime ici en ce moment, dit Gauthier. Sur quoi roule votre thèse ?

 

– Sur le mythe de Janus en Gaule.

 

– J’en parlerai au Père. Il se fera un plaisir de vous en établir un dossier. C’est sa manie. Une thèse, ça donne un volume du type de ceux-là ?

 

Il montrait les ouvrages qui s’étalaient sous la vitrine destinée aux nouveautés. Ces livres, on l’a déjà dit, s’accompagnaient, suivant la mode actuelle, d’une série de photographies de leurs auteurs. Marcel se mit à regarder celles-ci, de son œil de provincial, toujours intéressé par les physionomies des vedettes parisiennes. Se trompait-il ? Voici qu’il crut reconnaître, parmi six ou sept autres, avec un étonnement stupéfié, le visage du jeune homme qui attendait la veille, à la porte des Enfants-Malades, la sortie des laborantines et qui s’éloignait avec la plus jolie d’entre elles. Comme il considérait ce portrait avec plus d’attention, Gauthier lui dit :

 

– C’est un de nos auteurs les plus nouveaux, un monsieur Alfred Harny, jusqu’ici un poète obscur, mais qui s’est décidé à écrire des romans. Le second vient de paraître. Il est très à la page, et il en a un succès ! Son volume s’appelle le Lac caché.

 

– Je vais vous le prendre, fit Marcel. Je n ai rien à lire et cette figure m’intéresse.

 

– On mettra l’exemplaire sur mon compte, dit Marcelin Breschet, car, moi aussi, je suis un client de la boîte. Je ne suis pas un littérateur, insista-t-il, mais grâce à Raymond, je me constitue ma petite bibliothèque auvergnate où figure une bien intéressante biographie de notre ancêtre le chirurgien. Si je reste un partisan déterminé de la nouveauté dans les entreprises, nous ne les menons à bien, je m’en rends compte, qu’avec les facultés que nous héritons de nos morts. Et moi j’ai hérité de l’aïeul, – il regardait sa montre, – le scrupule de l’exactitude. J’ai un rendez-vous à trois heures et demie boulevard Suchet. Juste le temps de m’y rendre. Où veux-tu que je te dépose, Marcel ?

 

– Il est trop tard pour aller à la Bibliothèque Nationale, répondit le jeune homme. Je ne suis pas loin de la rue des Écoles. Je vais rentrer à pied chez moi, et lire ce Lac caché avant le dîner.

 

– Tu me diras ce que tu en penses, fit le grand-père. Il eut une expression dans les yeux qui s’accordait trop avec quelques-unes des idées éveillées dans l’esprit de son petit-fils. L’homme d’affaires amoureux savait-il l’intimité de l’écrivain avec la laborantine ? Car c’était bien Harny qui attendait, la veille, à la porte de l’hôpital, et celle qu’il attendait, c’était peut-être Paule Gauthier, la sœur de Raymond. Était-il possible que les deux amants eussent conçu le projet d’extorquer les cent mille francs demandés dans la lettre de Nevers ? Il fallait d’abord être sûr qu’ils fussent amants ? Tel était l’intérêt suscité chez Marcel par le mystère des relations de Paule avec l’un et l’autre des deux hommes que, tout en suivant le trottoir du boulevard Saint-Germain, il commença de feuilleter le volume qui pouvait lui révéler le caractère de Harny. N’ayant pas de coupe-papier qui lui assurât une lecture suivie, il demeura étonné, dans les quelques pages lues de-ci de-là, par l’accent d’une exaltation presque mystique. Le héros du Lac caché se dévouait moralement à une femme qu’il aimait sans le lui dire et dont le mari était son meilleur ami. Le roman, qui se passait pendant la guerre, se terminait par une scène d’une invraisemblance et d’un romanesque extraordinaire où l’amoureux, blessé grièvement sur le champ de bataille et agonisant, avouait à son ami qu’il avait passionnément aimé sa femme et lui demandait de le lui dire, quand il serait mort.

 

 

LIRE LA SUITE ..

 



Site créé gratuitement grâce à OnlineCreation.me